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mercredi, 25 octobre 2006

Troisième élément

Nus, indécents, enlacés, étreints jusqu'à l'étouffement, immobilisés par l'insoutenable attente, tétanisés de crampes,  nos esprits toujours entremêlés, nous nous vidons de nos vies par le bas, par les pieds. Nos membres inférieurs semblent prendre racines et développer un réseau souterrain intriqué.

Alors la terre se met lentement à monter, brune marée inéluctable, nous entraînant dans un courant qui veut nous arracher une fois de plus l'un à l'autre. Nos regards se supplient comme si nous avions notre mot à dire, comme si nous pouvions changer le cours du Rituel, comme si...

Nous sommes encore étroitement soudés mais nous comprenons bien que la force de la terre montante va nous séparer, tester une fois de plus le mystère du Rituel. Le nouvel obstacle est devant nous et nous ne pouvons nous y résoudre, nous luttons vaillamment, nous accrochant par habitude à
notre utopie, cette chimère de nos fantasmes insensés.

Et la terre monte toujours. Elle nous arrive à présent aux genoux, dans des remous de plus en plus violents et irrésistibles. Forts de nos épreuves, nous nous battons encore,...Pourquoi? Pour qui?

Vous me regardez d'un oeil confiant embué de larmes. Je vous souris. Au même instant, nous avons compris...

Nous lâchons prise de concert, tristes et apaisés, épuisés et satisfaits.

Alors la vague brune me bascule, m'aspire, me siphonne loin de vous, et me fracasse contre les murs glacés du sanctuaire, brisant os et volonté. Je peux encore entendre le craquement de votre carcasse brisée, aussi malmenée que la mienne, puis les yeux, les oreilles, les poumons s'emplissent de terre et les restes d'énergie vitale finissent par s'échapper par les extrémités. C'est le néant. Je ne suis que terre meuble délivrée du joug du corps et de la pensée, soumise à l'omniscience suprême.