lundi, 11 février 2008
Éveil du Rituel
The Flood © 2008 Scott James Prebble
Le temps où le Rituel a été suspendu
se compte-t-il en secondes ou en siècles ?
Comme il est étrange que ce soit
très précisément à l'instant où
j'ai eu la sensation illusoire de
me libérer de l'emprise des brumes
que tout a basculé dans le Néant.
Un Néant fort heureusement provisoire,
puisque me voici à nouveau conscient,
en ce lieu qu'ailleurs on appellait,
ou appelle, ou appellera Cathédrale;
en ce lieu multiplement habité,
par les statues blafardes,
par les brumes omniscientes
nées du coeur vivant des Marais,
par les pouvoirs de la Grande Prêtresse,
par cet autel noir et glacé surtout,
cet autel où vous êtes exposée nue,
ouverte, absolument indécente.
Quand l'indécence est absolue,
est-elle encore indécence ?
Je reprends peu à peu mes esprits.
J'ai le souvenir d'une pluie battante,
mais maintenant il neige lentement.
Et l'atmosphère est plus glaciale
que jamais. La pensée que le froid
vous est certainement une torture
effleure ma conscience, mais
je ne m'y arrête pas; la compassion
n'a pas sa place ici et maintenant.
"On" (la Grande Prêtresse ?
les brumes ? les statues ?
je ne saurais le dire...)
m'entrouvre les portes de votre
esprit, sans doute pour que
je sois envahi par l'immensité
de votre Blasphème : vous avez osé
penser ? croire ? désirer ? rêver ?
que le Rituel pourrait s'accomplir
sans la Grande Prêtresse !
Et je n'ose répéter ici
à quoi d'autre vous avez osé
penser ? croire ? désirer ? rêver ?
Difficile pourtant d'échapper
à la conviction que vous allez
me permettre de faire entrer
le Rituel dans une nouvelle ère...
Impossible pourtant d'échapper
à la certitude que d'une façon
ou d'une autre, et probablement
de bien des façons différentes,
vous serez mienne...
reprendre son cours. "On" peut
maintenant me refermer les portes
du secret de vos pensées.
La prochaine fois, c'est vous-même
qui me les ouvrirez...
Je m'approche lentement de l'autel,
je contemple longuement le ballet
des flocons qui dansent avant
de mourir sur votre corps pâle.
Du bout du doigt, pour la toute
première fois, je vous touche,
j'effleure votre peau blême...
Vous êtes glacée et cela me plaît.
Mon doigt glisse entre vos seins,
virevolte jusqu'au nombril,
s'approche de......
J'entends des pas...
05:35 Publié dans Duos d'ecriture, Rituel Ancien | Lien permanent | Commentaires (1) | Tags : éveil, rituel, rite, supplice, complice, nue, indécente
mardi, 22 août 2006
Acquiescement
Dissolue dans les brumes des Marais, j'erre dans cet état évanescent de non-être, de presque mort, dans le temps sans durée et l'espace sans champ que sont le temps et l'espace du Rituel.
Juste là, à peine une intuition, un pressentiment plutôt qu'une véritable sensation, juste là, une lueur, infime particule de lumière, réminiscence fantomatique asphyxiée de brumes frémit. A la lisière de la conscience inconsciente se dessine l'espérance.
L'étincelle ondule d'une onde concentrique qui semble commencer à se propager dans une lenteur contemplative. Pourtant anéantis, engloutis par les brumes, nos atomes dispersés ont du garder la mémoire d'outre-tombe de la joie. Ils se reconnaissent, s'attirent irrésistiblement comme s'ils avaient été magnétisés par les rires partagés. La clarté prend de l'audace et enfle doucement, s'enroule en une spirale luminescente en tournoyant et crée une gravité qui absorbe de plus en plus de particules de nous.
Vous êtes partout, tout autour de moi, tout en moi. Votre omniprésence anime ma conscience, et juste là, la vôtre se met à palpiter à son unisson. Nous reprenons nos esprits, d'un seul esprit. Nos volontés encore baignées l'une de l'autre se différencient à présent et votre pensée se détache pour imprimer ses images à la mienne.
C'est une pensée de moi…Non plutôt, une pensée de la femme. Pas une femme parfaite et aseptisée au corps de déesse, pas une trop jeune fille trop pure, que vous auriez pu, peut être du, me préférer. Juste la pensée d'une femme. Pas vraiment jolie, pas vraiment cultivée, pas vraiment bonne maitresse de maison, pas vraiment l'archétype de la mère ou de la femme de pouvoir. Juste une femme de tous les jours, qui se réveille les yeux bouffis, qui a toujours une lessive de retard, qui grille un fusible quand la journée dépasse un certain niveau de décibels, une femme qui vit au rythme des bagarres des enfants, de ses hormones et des frustrations du quotidien. Ni un ange, ni un démon. Cette femme banale que votre intuition vous a poussé à choisir pour le Rituel et qui vous a ouvert les portes de la Prophétie. Cette femme que vous n'idéalisez pas, que vous acceptez telle quelle avec son impudique indécence, ses contradictions, son humour douteux, ses excès, ses carences, ses faiblesses et ses souffrances.
Par cette adhésion inconditionnelle, vous me redonnez naissance.
Mon corps reprend forme, les sensations refont surface, je réintègre la vie dans un éclair blanc.
Vous êtes toujours en moi, et je comprends instinctivement que je dois suivre vos pas, que je dois moi aussi embrasser tout votre être. Alors, je laisse mon amour souscrire à tout ce que vous êtes, vos doutes, vos certitudes, vos désirs , vos besoins inassouvis.
Ma respiration relance mon cœur et c'est de lui que vous montez en moi, des bouffées d'aura lumineuse s'échappant de ma bouche à chaque expiration et à votre tour vous reprenez forme.
A nouveau nus, l'indécence reprend ses droits. Entrelaces peau contre peau, peau dans peau, nous goutons la paix de cet instant d'éternité indéfinie dans le temps sans durée qu'est le temps ici. Confondus, nous échangeons un regard confiant et entendu. Notre agrément mutuel et inconditionnel nous a permis de franchir l'épreuve de l'Air. Nous détenons la Seconde Clé…
10:15 Publié dans Duos d'ecriture | Lien permanent | Commentaires (6) | Tags : fantasme, conte, histoire, orage, reve, supplice, complice
dimanche, 20 août 2006
Les brumes des Marais...
Nous qui étions si merveilleusement proches après avoir vaincu ensemble cette première épreuve, liquéfiés, unifiés par les sanglots de l'orage sur l'étroit autel de pierre sombre et froid, nous dont les épidermes vibrants se frôlaient au point que nous pouvions sentir l'électricité bondir spontanément entre nos deux corps, nous qui épousions encore les notes délicates, pures et cristallines du rire des enfants innocents, nous voila de nouveau saisis , happés par les brumes des Marais. Elles brisent net l'enchantement et nous déchirent l'un de l'autre dans un fracas assourdissant de hurlements de bêtes agonisantes. Aveuglée par les larmes, le cerveau violé par l'ignominie de la douleur, l'écho de mon regard contemple les volutes grises vous soustraire à notre utopie, cette chimère de ce fantasme insensé de la Première Clé, et ma souffrance déjà indicible s'intensifie encore de la vôtre...La déformation de votre visage qui s'évanoui dans le néant des brumes confirme notre communion dans la détresse incommensurable...
Est-ce la Mort?
Mon essence est annihilée par sa dispersion dans l'atmosphère fétide.
D'après les écritures, je devais pourtant survivre...
L'abandon à la Mort serait-elle la Quatrième des Conditions obscures dont parlent vos grimoires?
Peut-être vos particules sont-elles aussi désagrégées dans les bouffées de brumes immondes...
Peut-être, juste là...
02:20 Publié dans Duos d'ecriture | Lien permanent | Commentaires (2) | Tags : fantasme, conte, histoire, orage, reve, supplice, complice
mercredi, 16 août 2006
Quand l'orage...
Nous sommes là, nus, indécents, ruisselants, frissonnants, étendus cote à cote sur la pierre glaciale de l'autel, communiant dans une demi-conscience, presque une demi-mort, livrés à la jubillatoire torture aléatoire de l'orage.
Vous n'avez plus à questionner, nous partageons la délectable horreur qui nous transperce de toutes parts, agite nos corps de convulsions et anéanti nos volontés.
Nous demeurons ainsi abandonnés dans le temps suspendu de la Prophétie, les Brumes des Marais emmêlant nos âmes.
Quand un supplice s'éternise trop, l'esprit finit par anesthésier le corps. Mon enveloppe, soumise à ces outrages depuis un temps infini, dans ce temps sans durée qu'est le temps ici, se détache enfin de son calvaire…
Je peux alors rassembler un peu de ce qui me reste d'énergie vitale pour vous assister dans l'épreuve. Mes mains viennent délicatement se poser en remparts sur vos yeux. Au creux de la peau sensible de leurs paumes, vos cils, ainsi protégés, battent d'une caresse éthérée et votre visage se relâche imperceptiblement. Cette ébauche d'apaisement pourtant si modeste, vous arrache un soupir de soulagement qui semble exhaler des profondeurs de votre cœur. L'unique sanglot flotte aérien jusqu'à l'ouverture en étoile du plafond pour rencontrer la fureur des éléments. Ce parfait fruit de compassion atteint la tempête en plein centre. Sous l'absolue tendresse du choc, l'orage s'évapore en un instant.
La pluie a cessé, l'Ouragan s'est évanoui…
Grelottants dans notre impudique nudité, luisants de désir, encore étincelants des diamants de pluie qui scintillent sous l'onde lumineuse de la blanche Lune enfin réapparue, nous nous asseyons en nous ébrouant et en riant comme des enfants, simplement heureux d'avoir découvert la Première Clé de la Prophétie.
00:05 Publié dans Duos d'ecriture | Lien permanent | Commentaires (8) | Tags : fantasme, conte, histoire, orage, reve, supplice, complice
samedi, 24 juin 2006
Dans la tourmente
Nue, indécente, ruisselante, frissonnante sur la pierre glaciale, je me livre sans résistance au courroux de l'orage. Ses dizaines de lames effilées aiguillonnent tout mon corps et le secouent maintenant d'un grelottement convulsif continu. Ses perles glacées me forcent à fermer les yeux et la flagellation n'en est que plus cruelle. Chaque goutte est imprévisible, une tentation, un martyre. Où va-t-elle éclater? Où coulera-t-elle ensuite? Leur accumulation est comme les dards d'un essaim d'abeilles mélangés à des caresses de miel. Supplice ultime, torture aléatoire. L'ouragan est un amant inventif et explorateur, mais ne me laisse guère le temps de mémoriser les zones érogènes qu'il me fait découvrir, j'ai à peine le temps de me demander si c'est votre volonté qui le guide et l'inspire à ce point, entre extase et horreur...Une larme vient d'échouer sur mes lèvres et coule doucement dans ma bouche, éveillant une soif nouvelle. Alors je l'ouvre cette bouche pour apaiser sa brulure, mais la pluie, de plus en plus vicieuse, se dérobe et vient plutôt transpercer d'autres points sensibles. C'est alors que je perçois votre pensée, limpide..."Et si elle s'écrase ici, juste ici, qu'est ce que ca vous fait? Et là juste là, c'est mieux? Moins bien?". Ne voyez-vous donc pas que je ne suis qu'une transe, que le spasme n'offre aucun répit, que j'ai dépassé le stade de l'analyse et que je ne suis plus qu'instinct animal retenu sur cette pierre par le seul pouvoir de la Première Incantation. Vous voulez que je survive au Rituel m'a-t-on laissé entendre, mais mon désir de vivre m'abandonne un peu plus à chaque pic gelé! Je me laisse dériver, je perds pieds, j'entre dans une demi-conscience... Entre vie et mort, malgré les mugissements des éléments et le fracas des cascades d'eau qui tombe de l'étoile, j'entends soudain des pas...comme une nouvelle musique...
13:05 Publié dans Duos d'ecriture, Rituel Ancien | Lien permanent | Commentaires (6) | Tags : fantasme, conte, histoire, orage, reve, supplice, complice